Une refondation institutionnelle ambitieuse pour répondre aux aspirations de stabilité et de gouvernance responsable du peuple haïtien
Le 28 août 2025 restera une date marquante dans l’histoire constitutionnelle haïtienne. Le Comité de Pilotage de la Conférence Nationale (CPCN) a officiellement remis au Conseil Présidentiel de Transition le projet de Constitution de la République, accompagné d’un imposant rapport de 1 400 pages détaillant le processus d’élaboration. Ce document, fruit d’un travail minutieux entamé suite au décret du 17 juillet 2024, s’apprête à être publié au journal officiel avant sa diffusion publique.
Une refondation institutionnelle d’envergure
Le CPCN présente ce projet comme « une étape décisive vers la refondation institutionnelle, politique et sociale d’Haïti ». L’ambition est claire : répondre aux aspirations profondes du peuple haïtien en matière de stabilité, de justice sociale et de gouvernance responsable. Les innovations proposées touchent tous les aspects de la vie politique et sociale du pays.
Un exécutif renforcé pour plus de stabilité
Le binôme présidentiel, une innovation majeure
L’une des réformes les plus significatives concerne l’instauration d’un binôme Président-Vice-président élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans. Cette innovation vise à favoriser la stabilité de l’Exécutif, répondant ainsi aux critiques récurrentes sur l’instabilité gouvernementale.
Une succession présidentielle clarifiée
Pour mettre fin aux « transitions instables et interminables », le projet établit un ordre de succession clair en cas de vacance simultanée de la Présidence et de la Vice-présidence. Cette mesure pourrait considérablement réduire les crises institutionnelles qui ont marqué l’histoire politique récente du pays.
Une représentation politique repensée
Réduction drastique des postes électifs
Le projet propose une rationalisation audacieuse avec la suppression de plus de 2 000 postes électifs. La nouvelle configuration prévoit :
- 1 Maire par commune
- 1 Député par arrondissement
- 2 Sénateurs par département
- Assemblées municipales de 3 à 7 membres
Cette simplification s’accompagne d’une harmonisation des mandats à cinq ans pour éviter l’instabilité politique chronique.
Un gouvernement plus compact
L’Exécutif sera également rationalisé avec une réduction du nombre de ministères à douze, favorisant une meilleure coordination et une gestion plus efficace des politiques publiques.
L’inclusion au cœur du projet
La diaspora enfin intégrée
Le projet reconnaît officiellement la diaspora haïtienne en créant des circonscriptions électorales à l’étranger et en garantissant le droit de vote des Haïtiens vivant à l’étranger. Cette inclusion dans la vie politique nationale, y compris dans des postes de responsabilité, constitue une avancée majeure.
La parité homme-femme inscrite dans le marbre
L’inscription du principe de parité dans les institutions de l’État marque une volonté de modernisation et d’égalité des genres dans la gouvernance.
L’engagement de la jeunesse
Le projet prévoit une forte implication des jeunes dans les postes de responsabilité et dans la vie politique, reconnaissant leur rôle crucial dans l’avenir du pays.
Des secteurs stratégiques renforcés
L’éducation, priorité nationale
L’allocation d’au moins 4% du PIB au secteur éducatif témoigne de la volonté de faire de l’éducation une véritable priorité nationale, garantissant qualité et accessibilité.
Une justice indépendante
Le projet renforce l’indépendance judiciaire en confiant au Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) le choix des juges, nommés jusqu’à l’âge de 75 ans. Cette réforme vise à protéger la magistrature des pressions politiques.
La décentralisation au service du développement local
Une redistribution équitable des ressources
L’une des innovations les plus audacieuses concerne la décentralisation budgétaire : au moins 50% des recettes fiscales seront reversées aux budgets départementaux, puis aux budgets communaux. Cette mesure pourrait révolutionner le développement local.
Une gouvernance territoriale simplifiée
Le remplacement des Conseils départementaux par des Gouverneurs départementaux et l’élévation de certains chefs-lieux en communes visent à améliorer l’efficacité de la gouvernance locale.
La lutte contre la corruption institutionnalisée
La transformation de l’ULCC en Office de Lutte Contre la Corruption, institution indépendante, et le renforcement de la Cour supérieure des comptes témoignent de la volonté de combattre efficacement la corruption.
La valorisation de l’identité nationale
Le créole à l’honneur
La revalorisation de la langue créole avec la rédaction des actes de l’État en créole (traduits en français) et le renforcement de l’Académie créole marquent une reconnaissance officielle de l’identité linguistique nationale.
La mémoire historique célébrée
L’institution du Bois Caïman comme fête nationale et l’inscription du respect des héros de la patrie dans la Constitution renforcent l’ancrage identitaire et mémoriel.
Vers une société plus inclusive
Le projet intègre de nouvelles réalités constitutionnelles : reconnaissance des personnes vivant avec un handicap, du sport, des nouvelles technologies, et l’universalisation de la citoyenneté haïtienne pour éliminer les préjugés entre citadins et ruraux.
Un pari sur l’avenir
Ce projet de Constitution 2025 représente un pari ambitieux sur l’avenir d’Haïti. En proposant des réformes structurelles majeures touchant tous les aspects de la gouvernance, il aspire à « bâtir une Nation forte, libre et indépendante ».
Le défi sera désormais de passer de l’intention à la réalisation, en s’assurant que ces innovations constitutionnelles trouvent leur traduction concrète dans la vie politique et sociale haïtienne. La publication imminente du texte intégral permettra au peuple haïtien de s’approprier pleinement ces propositions de refondation institutionnelle.
L’histoire jugera si ce projet de Constitution 2025 aura su répondre aux aspirations séculaires de stabilité et de développement du peuple haïtien.